Léa de Lonval, une demi-mondaine d’une cinquantaine d’années entretient depuis sept ans une relation charnelle et maternelle avec Fred Peloux, un séduisant jeune homme qu’elle surnomme affectueusement Chéri. A l’automne de sa vie, la courtisane, observant avec une pointe d’amertume leur idylle s’étioler, décide de mettre un terme à leur liaison. Bientôt, Chéri n’aura d’yeux que pour son épouse Edmée, une jeune fille insouciante et pleine de fraîcheur. Mais les ruptures ne vont pas sans chagrin ni regret. La culpabilité ronge Chéri qui par pitié ne peut se résigner à abandonner définitivement son ancienne maîtresse. Quant à Léa, la douleur de voir son amant tergiverser la plonge un peu plus chaque jour dans une mélancolie destructrice.
Chéri, dont la personnalité trop creuse émeut peu, refuse de grandir et se cramponne à cette demi-mondaine qui lui a enseigné les plaisirs de la chair. De prime abord désinvolte, il finira par comprendre qu’il n’est pas si aisé de tourner le dos à son passé pour dire adieu à une première expérience amoureuse, même si cette dernière s’est faite dans les bras d’une femme de petite vertu. Étrangement, si le titre du roman met en vedette ce jeune homme insouciant, l’héroïne du livre reste incontestablement Léa. Cette maîtresse délaissée est bien plus attachante.
En toile de fond, la romancière nous livre une peinture ironique des demi-mondaines parisiennes de la Belle-époque, des femmes frivoles qui se sont enrichies grâce à leur pouvoir de séduction. Cette œuvre fut produite au début des Années folles (1920), une période qui a dû indéniablement influencer l’auteur lorsqu’elle écrit Chéri car ses personnages, et en particulier Léa, sont résolument modernes. Les femmes de cette époque prennent davantage conscience de leur féminité. Les corsets qui les emprisonnent depuis toujours dans une rigidité asphyxiante se desserrent peu à peu. Leurs robes aux matières désormais plus amples et légères épousent davantage leurs courbes appétissantes, attirant l’œil inquisiteur de la gente masculine. De nouvelles musiques vont remplacer la traditionnelle valse dont le tango, une danse aguichante initialement réservée aux maisons closes d’Argentine. De nouveaux artistes féminins habillés de plumes et de strass tels que Joséphine Baker se dénudent également sur scène. Cette sexualité revendiquée troublera d’autant plus les hommes qu’elle annonce déjà l’émancipation future des femmes.
J’avais découvert cette écrivaine talentueuse en lisant Le blé en herbe, un petit chef-d’œuvre d’écriture sur les bouleversements de l’adolescence.
Colette, d’une liberté farouche pour son époque est une fine psychologue qui écrit remarquablement bien. Sa plume élégante m’a ici, une fois de plus, charmée. Dans ce roman doux-amer où souffle une légère brise féministe, l’auteur décrit avec une grande sensibilité la vulnérabilité d’une femme mûre qui voit les derniers feux de sa jeunesse tout comme l’éclat de sa beauté s’envoler.
Un portrait de femme vieillissante poignant.
La bande-annonce de la brillante adaptation cinématographique de 2009 par Stephen Freas, le réalisateur des Liaisons dangereuses:
Bonjour,
Je passe te souhaiter de bonnes fêtes de fin d’année !
J’ai hâte de regarder « Chéri », surtout que M. Pfeiffer est une bonne actrice !
En ce qui concerne Colette, cette auteure » m’effraie » car son « Blé en herbe » m’a prodigieusement ennuyée !
Gros bisous,
Ondine
Merci Ondine! Contente de te lire! Je te souhaite également de très bonnes fêtes! J’avais aimé le Blé en herbe et j’ai apprécié la lecture de Chéri mais ce n’est pas son meilleur je pense.
Bonjour, pas lu non plus le roman mais le film m’avait beaucoup plu. Je trouve que Stephen Frears a la main heureuse avec l’adaptation d’oeuvres littéraires françaises. Bonne après-midi.
J’ai vu le film il y a quelques jours en redif à la TV . J’ai aimé le jeu magnifique de Michel Pfeifer . Je n’ai pas lu le livre car j’avoue que Colette m’ennuyait , mais il est peut-être temps de m’y remettre … La Bannière est splendide !
j’ai mis un moment à lire ce livre. Je l’ouvrais et le refermais, mais une fois qu’on est pris dedans, hop là ! ça se lit d’un trait ! j’ai beaucoup aimé cette histoire. Plus Chéri est navrant par son vide intérieur, et plus Léa nous attire !. J’ai beaucoup Colette.
Je n’ai pas lu le roman mais j’avais beaucoup apprécié l’adaptation ciné 🙂
La plume de Colette nous envoûte une fois de plus. Certes, le film n’est pas toujours à la hauteur du roman, mais il a le charme des décors et celui si séduisant de l’actrice.