Avant de vous livrer par le menu détail mes impressions sur cette lecture insolite, attardons-nous un instant sur la couverture alléchante de ce journal. De prime abord, la photographie est plutôt flatteuse. Elle représente un Maori recouvert de tatouages tribaux. Son regard méditatif est fixé sur l’horizon qui s’étend à perte de vue sous ses yeux. Cette figure contemplative paraît délivrer un message subliminal : en ouvrant cet ouvrage, le lecteur s’apprête à plonger dans les récits d’aventures d’un voyageur passionné, ou plus probablement, dans un essai historique et ethnologique (à la manière de Lévi-Strauss…) dont l’étude porterait principalement sur l’origine des peuples néo-zélandais. Du moins, c’est ce que semble vouloir suggérer une telle couverture. Cependant, à mon grand regret, il s’est avéré que le but recherché était tout autre.
Au pays du long nuage blanc, dont le titre à la sonorité poétique fait écho à une vieille légende néo-zélandaise, relate vraisemblablement des faits contemporains : le séjour de cinq mois à Wellington, en Nouvelle-Zélande que l’auteur Charles Juliet a effectué durant la période du mois d’août de l’année 2003 à celle de janvier 2004. Ce carnet de voyage retrace avant tout les rencontres (en majeure partie avec d’illustres inconnus) qui l’ont marqué, ses observations supposées critiques concernant la poésie en prose, et son désir impérieux de coucher sur le papier tous les mots ou phrases qui se sont imposés à son esprit tortueux au cours de ses moments de solitude, et ce malgré un manque désolant d’inspiration créatrice. L’écriture atypique de Charles Juliet est basée (comme l’a si bien exprimé le journaliste présentateur François Busnel qui anime l’émission littéraire La Grande Librairie sur France 5) sur le « silence », un sujet bien difficile à aborder et auquel je suis restée malheureusement hermétique.
Je vous laisse le soin de visionner cette courte vidéo narrant le parcours professionnel et artistique de cet écrivain poète, romancier et diariste moderne. Il faut bien le reconnaître, cette émission a au moins eu le mérite d’attiser ma curiosité.
Le présentateur enthousiaste vantait donc le talent d’écriture de Charles Juliet, un mystérieux olibrius qui, après de longues années de réclusion et de recueillement volontaire, aurait décidé de refaire surface afin d’écrire ses réflexions pseudo-intellectuelles et philosophiques sur son thème de prédilection : la quête de soi. Ma curiosité ayant été piquée au plus vif, je n’ai pu résister à la tentation de découvrir l’univers de cet écrivain si « génial » qui, sachez-le, n’aurait lu que cinq livres (dont l’un fut l’Etranger d’Albert Camus) jusqu’à l’âge de vingt-trois ans. La nécessité d’écrire s’est donc fait ressentir bien avant celle de lire. Enfin, le livre Au pays du long nuage blanc se déroulant en Nouvelle-Zélande, il devait s’inscrire parfaitement dans mon défi les Evasions tropicales.
D’une écriture assidue, l’auteur nous livre des fragments épars de pensées faussement intimes qui suintent le narcissisme et la prétention. La vision qui s’en dégage est celle d’un homme dispersé, un peu perdu et dont l’esprit en constante fermentation s’achève toujours sur d’éternelles réflexions stériles. Charles Juliet se donne des airs de vieux sage au risque d’égrener des lieux communs à pleurer de banalité. La plupart de ses anecdotes, moyennement intéressantes, arrivent à peine à meubler le vide sidéral de ses écrits. Ainsi, le voyage initiatique que l’auteur a entrepris dans le but d’élargir sa vision du monde est resté bien décevant pour la lectrice que je suis.
Au terme de cette lecture, j’en viens encore à m’interroger sur l’intérêt de publier les pensées « intimes » d’une personne de son vivant qui visiblement n’a pas grand-chose à raconter. J’ai refermé le livre avec la sensation frustrante d’avoir perdu mon temps. Ce projet d’écriture était bien trop audacieux pour une réflexion philosophique aussi médiocre. Être talentueux n’exclut pas que l’on puisse être parfois creux, ce faux- semblant de journal en est la preuve.
Avant de clouer définitivement au pilori cet auteur tourmenté, je lui laisse tout de même le bénéfice du doute et lirai peut-être un jour Lambeaux… Toutefois la crainte d’une nouvelle déception me rebute quelque peu. Ma bibliothèque regorge encore de nombreux trésors littéraires qu’il me tarde de partager avec vous, c’est pourquoi je doute que vous entendiez parler de Charles Juliet sur ce blog, une fois de plus cette année.
De meilleures lectures à découvrir pour voyager en livre à travers la Nouvelle-Zélande : Au pays du dauphin vert d’Elizabeth Coudge (voir le billet ici) et Princesse Maorie de Bernard Simonay.
Voilà ce qui s’appelle une exécution imparable. Pauvre Juliet ( que je n’ai jamais lu car ses seules apparitions sur les ondes m’avaient rebutée ) le voilà relégué au fond de la classe. Son visage exprime déjà un ennui abyssal, alors si sa littérature est du même acabit ?
Je ne comprends pas l’intérêt de raconter les mémoires d’un homme égris qui n’a rien à dire, n’aime pas les gens et qui préfère rester enfermer dans sa chambre plutôt que de visiter le pays inconnu dans lequel il séjourne. J’avoue que je n’ai pas trouvé sa personnalité vraiment sympathique. Et la cerise sur le gâteau il ne supporte pas de voir des enfants jouer. Bref, c’est un homme passionnant, n’est-ce pas?
Vu sur un autre blog, qui avait le même ressenti que toi. Pas tentée, donc.
Lol ce ne serait pas sur mon ancien blog Alex que tu aurais vu ce même article lol? (je suis en train de les retransférer, c’est pas du gâteau! Bises